Le jour, c'est différent. La lumière crue
du soleil, le rire des voisins de café,
l'odeur sale de l'essence brûlée ne laissent
rien au rêve. Ou si peu. Ou bien alors il faut
se contorsionner et ruser pour l'éprouver encore.

C'est cela même qu'il nous advint hier sur la route
de Colombiers où jamais nous n'allâmes à la plage
tant désirée. Il faisait chaud pourtant et nous allions
court vêtus. Tes cheveux sombres frôlaient ton cou
pâle et tes baisers embaumaient. La mer était si proche.

Il me semblait l'entendre qui léchait la grève nue.
Quatre, cinq kilomètres nous en séparaient, pas plus.
Or nous revînmes bredouilles. Pas le moindre grain
de sable gris, pas le moindre effluve de sel. Rien.

Rien ? Pas si sûr. La nuit de rapine qui s'en suivit,
volant au soir une once de son pouvoir, nous vit nous aimer
comme la mer enviée eût pu le faire et par trois fois
je sentis le rivage s'éclairer dans tes yeux mouillés.